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RETENUE A LA SOURCE

La direction des Finances Publiques a inauguré un espace dédié à la retenue à la source. Le projet se veut rassurant ; la présentation des grandes options à arbitrer laisse même croire qu’aucune décision définitive n’a été prise et, une grande place serait laissée au dialogue social.
Cette soi-disant concertation n’est qu’une vaste fumisterie, un rapport de février 2012 émanant de la Cour des Comptes ayant déjà répondu à la plupart des interrogations.

Le tiers collecteur ?
Ce sera l’employeur.
Surtout, le circuit financier devrait être l’Acoss (Agence centrale des organismes de sécurité sociale), le réseau des ursaffs, et non la DGFIP.
Avec toutes les suppressions d’emplois en cours et à venir dans notre administration – plus de 2100 postes supprimés en 2016 – comment imaginer sérieusement que la création d’un circuit au sein de la DGFIP, soit retenue ? la Retenue à la Source sera surtout une nouvelle occasion de supprimer des emplois à la DGFIP.

La Retenue à la Source n’a évidemment comme seul objectif que le rendement budgétaire, au détriment des usagers comme des agents de la DGFIP :

AUCUN GAIN POUR LES CONTRIBUABLES
La retenue à la source est présentée aux usagers comme une méthode indolore pour prélever l’impôt, à la fois plus efficace et plus simple, puisque prélevée directement à la source.

PLUS EFFICACE ? en fait une escroquerie !
La retenue à la source n’a pas d’impact majeur sur le taux de recouvrement final de l’impôt sur le revenu. En 2009, il était en France de 99,4% contre 99,5% aux Pays-Bas et 99,7% au Danemark, deux pays pratiquant la Retenue à la Source.
Alors pourquoi entamer une véritable révolution du système fiscal pour un avantage final si mince ?
La réponse est simple. Les pays pratiquant la retenue à la source prélèvent en cours d’année des montants d’impôt sur le revenu supérieurs à l’impôt dû en fin d’année, génèrant ainsi des avantages de trésorerie pour les États. La régularisation en fin d’année est donc le plus souvent un remboursement en faveur des usagers (jusqu’à 84 % des cas en Australie).
Donc, la Retenue à la Source est bien souvent un prêt sans intérêt effectué au gouvernement.

En outre, les contribuables ne réclament pas systématiquement les remboursements auxquels ils pourraient prétendre. Ainsi, aux Pays-Bas en 2010, 340 000 contribuables n’ont pas déposé de déclaration facultative alors qu’ils auraient pu bénéficier de restitutions d’impôts. En 2006, en Espagne, c’est près de 500 millions d’euros versés en excédent par les contribuables qui n’ont pas été réclamés.

Cerise sur le gâteau, la Retenue à la Source apparaît comme un levier mobilisable rapidement pour instaurer des prélèvements supplémentaires. Ainsi, en Australie, il peut arriver que le Gouvernement adjoigne des taxes supplémentaires au prélèvement de la retenue sur les salaires.

PLUS SIMPLE ? C’est à voir
Comparé aux autres pays de l’OCDE, l’impôt sur le revenu français est particulièrement personnalisé : imposition par foyer fiscal, quotient familial, prise en compte des charges et de nombreuses réductions ou crédits d’impôt. S’il est envisageable de conserver un tel système avec la Retenue à la Source, il est par contre quasi-impossible de concilier personnalisation, simplicité et confidentialité.

Tout d’abord, plus l’impôt est personnalisé, plus la régularisation est nécessaire. Il faudra donc toujours remplir des déclarations de revenus, notamment pour récupérer le trop versé !

Ensuite, la Retenue à la Source doit être calculée sur la situation actuelle de l’usager. Dans les pays la pratiquant, soit l’usager communique lui-même ses données personnelles à son employeur, soit ce dernier a accès aux données personnelles de ses salariés, notamment par un accès internet autorisé aux données fiscales.
La méthode présentée par le rapport garantissant le plus de confidentialité, fournir seulement aux employeurs le taux moyen d’imposition (TMI), est très loin d’être satisfaisante. Exemples :
ex 1 : si un salarié a un TMI supérieur à ses collègues avec le même salaire, c’est qu’il a forcément d’autres sources de revenus, ou un conjoint avec de bons revenus. Pourquoi l’augmenter ?
ex 2 : si un salarié a un TMI nettement inférieur à ses collègues avec le même salaire, c’est qu’il a sans doute des charges, notamment familiales, importantes. Donc un bon candidat pour un chantage à l’emploi !
Sans parler des salariés cumulant plusieurs activités, pour qui ce sera compliqué de calculer le TMI puis d’en informer tous les employeurs.

DES REDUCTIONS DRASTIQUES D’EMPLOIS POUR LA DGFIP !
Le rapport de février 2012 envisage déjà de nombreuses suppressions d’emplois.
Ainsi 130 emplois temps plein seraient économisés sur les délais de paiement, moins nombreux puisque l’impôt sur le revenu serait prélevé à la source. Le rapport ne chiffre pas le nombre d’emplois supprimés par le transfert des acomptes de l’impôt sur le revenu à l’Acoss. Pourquoi maintenir un réseau de recouvrement si l’impôt sur le revenu, et pourquoi pas les impôts locaux, sont prélevés par les URSAFF ?
Tout simplement, pourquoi maintenir deux missions ?

Mais les conséquences seront aussi lourdes pour les services d’assiette. Dans seulement un quart des pays pratiquant la retenue à la source, la déclaration par le contribuable de ses revenus en fin d’année reste obligatoire. Cette formalité est allégée dans les pays où l’administration fiscale adresse aux contribuables une déclaration pré-remplie, comme en France. Elle l’est surtout lorsque le contribuable n’a aucune régularisation à effectuer.
Il n’y a aucune raison que le fonctionnement de la Retenue à la Source soit différent en France des autres pays qui la pratiquent déjà. Les usagers qui ne déposent pas de déclaration mais qui ont été suffisamment prélevés, le cas général, ne seront pas du tout relancés. Tant pis pour la mise à jour de la taxe d’habitation. Avec en parallèle l’obligation de télédéclarer, qui a d’ailleurs été rappelée dans les documents du groupe de travail du 19 octobre 2015, ce sont deux tâches majeures d’assiette : la saisie et la relance des défaillants, qui vont pratiquement disparaître.

Au final, ce sont tous les services qui s’occupent de l’impôt sur le revenu, assiette comme recouvrement, qui seront impactés, et menacés de fermeture.

Article publié le 12 novembre 2015.


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